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Hbsc Xris Blog - A la poursuite du réel, historique et scientifique, parce que 1984, nous y sommes presque.

Archéologie, Histoire de l'agriculture, de l'élevage, de l'alimentation, des paysages, de la nature. Sols, faunes et flores. Les sciences de la nature contre les pseudos-sciences, contre l'ignorance, contre les croyances, contre les prêcheurs de l’apocalypse.

Sur-urbanisation des banlieues et rurbanisation des campagnes, un bouleversement des paysages

30 km au sud de Paris, en 1954 et en 2010. Source : remonterletemps.ign.fr

30 km au sud de Paris, en 1954 et en 2010. Source : remonterletemps.ign.fr

Je me souviens d’une jolie meulière que nous aurions aimé acheter dans une petite commune de l’Essonne au début des années 1990. 

Elle avait un magnifique terrain de 2400m2 sur un sol merveilleux d’anciennes zones maraîchères. A peu près la moitié du terrain comprenait un verger palissé soigneusement entretenu, le rêve pour qui voulait passer ses loisirs à travailler la terre et produire sa nourriture quotidienne… 

Malheureusement, le propriétaire, profitant d’un changement de POS avait choisi de faire 3 parcelles de 800m2, 2 à bâtir, 1 avec la maison. 

800m2 étant trop petit, nous n’avons pas acheté.

En 2014, nous sommes venus nous promener dans cette rue, qui avait épouvantablement changé, le POS ayant encore été revu à la baisse.

Nous avons reconnu la belle meulière, mais stupeur,  son terrain avait été redivisé en 3 parcelles d’environ 260-270m2 et  2 pavillons neufs avaient été construits. Et pareille subdivision se se répétait dans toute la rue chaque fois que cela avait été possible.

Bien sûr, exit les vergers et tous les arbres fruitiers, exit les potagers du passé.

A part quelques arbres ou arbustes décoratifs, il n’y avait plus que des fragments de pelouses immaculées encadrant des allées impeccablement bétonnées et des terrasses rutilantes avec leurs transats et leur barbecue. Ce bitume, ce béton, ces carrelages, ces espaces extérieurs traités en annexe du salon, est ce la N/nature ?

Pour comprendre l’ampleur du problème et l'étendue monstrueuse des espaces ruraux grignotés, et détruits depuis près d'un siècle, avec une accélération effarante depuis 30 ans, pour toutes les zones qui entourent les grandes villes, et pour Paris, jusqu’à 50 km autour, il suffit de se rendre sur le site de l’IGN https://remonterletemps.ign.fr/

choisir « Comparer » puis le lieu que vous souhaitez comparer. 

2 volets s’ouvrent, on peut comparer les époques. Il est intéressant de commencer par la carte de l’état-major 1820-1866, comparez la avec le scan historique de 1950, remonter sur la carte IGN actuelle, c’est en général sidérant. Et puis déroulez les photos aériennes des différentes dates en commençant par la période 1950-1965, jusqu’à nos jours.

L’urbanisation est sidérante.

 

Ce ne sont pas seulement les lotissements pavillonnaires effroyablement morcelés en minuscules parcelles qui se sont multipliés, ce sont les zones commerciales tentaculaires qui les desservent autant utilement qu’inutilement et dévorent de gigantesques espaces, tant en bâtiments qu’en parkings grands comme plusieurs stades et le tout implanté bien souvent sur ce qui fut d’excellentes terres agricoles.

Ce sont également des cités entières d’immeubles qui se dressent sur d’anciennes terres maraichères comme cette Eco-quartier faite à Brétigny sur Orge (91) en partie sur les fabuleuses terres du semencier Clause (1°).

 

Les rurbains arrivés massivement dans les zones péri-urbaines ou dans les campagnes n’ont pas seulement contribué au morcellement et au bétonnage des parcelles, ils n’ont pas seulement détruits potagers et vergers, et parfois jusqu’au moindre pommier au motif qu’il fallait ramasser les pommes tombées (2°), ils ont modifié considérablement le traitement des rares espaces verts subsistants en en faisant ce que j’appelle des « annexes » de leur salon et à ce titre ont été pendant des années les premiers utilisateurs de produits phytosanitaires au m2, jusqu'à l'interdiction de cette année.

 

 

(1°) Je peux comprendre que l’on ait besoin de loger des gens mais honte à ceux qui ont appelé cela un Eco-projet aux motifs que cette cité a été construite selon des principes permettant de bonnes performances énergétiques, que la gestion des eaux y a été soignée et que des espaces dits naturels (je pouffe) y ont été créés.

Bétonner de si riches terres est ce cela l'écologie ? N'aurait-on pas pu lotir ces sols en jardins potagers que certains appellent de leurs voeux ?

 

(2°) J'ai eu un collègue de travail qui avait acheté une ancienne demeure de "maître" avec un beau terrain restant du morcellement d'un grand parc. Il avait dans son terrain un très beau pommier ancien et un jour, il vient me voir en me demandant comment "tuer" ou "arracher" son pommier sans trop se fatiguer. Je me suis étonnée "Il ne donne plus rien". Il m'a répondu "Oh si, j'ai bien 500 kg de pommes à ramasser par terre tous les automnes". Je lui ai alors demandé pourquoi "Diable vouloir détruire ce pommier qui te donne tant de pommes". Et puis en discutant, j'ai découvert que mon collègue ignorait que des pommes peuvent se conserver en cave pendant plusieurs mois en hiver, il pouvait donc au moins ramasser 100 kg des plus belles et proposer le reste à des voisins, cela étant, il m'a expliqué qu'il ne fréquentait pas ses voisins et que c'était bien du travail que de ramasser des pommes, et qu'il préférait acheter de belles pommes bien calibrées en magasin lorsqu'il en avait envie. Pour conclure, je lui ai dit "Si tu ne veux pas les ramasser, laisse les sous l'arbre, les oiseaux vont s'en régaler en hiver, même pourries". Je n'ai jamais oublié son regard d'horreur "Non mais tu es complètement cinglée, cela va faire moche dans mon parc !" Quelque temps plus tard, un paysagiste est venu lui arracher son pommier.

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