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Hbsc Xris Blog - A la poursuite du réel, historique et scientifique, parce que 1984, nous y sommes presque.

Archéologie, Histoire de l'agriculture, de l'élevage, de l'alimentation, des paysages, de la nature. Sols, faunes et flores. Les sciences de la nature contre les pseudos-sciences, contre l'ignorance, contre les croyances, contre les prêcheurs de l’apocalypse.

5. Une famille nombreuse de manoeuvre-vigneron de l'Yonne en 1860 : Une leçon de courage, travail, frugalité, à la charnière d'une époque pour se souvenir du réel, loin du mythe du bon vieux temps… La lessive d'Alexandrine ou une lessive du milieu du XIXème siècle

Jean François Millet : La lessiveuse

Jean François Millet : La lessiveuse

Rappel : (Lire pour plus de précisions)

http://hbscxris.over-blog.com/2020/04/une-famille-nombreuse-de-manoeuvre-vigneron-de-l-yonne-en-1860-une-lecon-de-courage-travail-frugalite-a-la-charniere-d-une-epoque-po

http://hbscxris.over-blog.com/2020/05/une-famille-nombreuse-de-manoeuvre-vigneron-de-l-yonne-en-1860-une-lecon-de-courage-travail-frugalite-a-la-charniere-d-une-epoque-po

http://hbscxris.over-blog.com/2020/06/une-famille-nombreuse-de-manoeuvre-vigneron-de-l-yonne-en-1860-une-lecon-de-courage-travail-frugalite-a-la-charniere-d-une-epoque-po

http://hbscxris.over-blog.com/2020/06/une-famille-nombreuse-de-manoeuvre-vigneron-de-l-yonne-en-1860-une-lecon-de-courage-travail-frugalite-a-la-charniere-d-u-3

 

La famille d’Etienne, Alexandrine et leurs 8 enfants habitait la petite ville de Seignelay, à 13 km au nord d’Auxerre. Seignelay, qui comptait au recensement de 1856, 1546 habitants, était à l’époque administrativement un chef lieu d’un canton de 11 communes.

 

Les deux époux se sont mariés en 1836 alors âgés respectivement de 33 et 23 ans. 

Etienne et Alexandrine ont perdu leur premier enfant en 1837 à l’âge de 11 mois et ont eu un enfant mort né, mais ils ont 8 autres enfants vivants et décrits en bonne santé à l’époque de l’étude en 1860 ce qui peut être qualifié d’exceptionnel.

A cette date, la fille ainée du couple, Nathalie, alors âgée de 21 ans, vit chez eux, aide sa mère, coud à partir de toile de chanvre les vêtements familiaux et le linge de maison et ramène également au foyer ses salaires de couturière à domicile chez des gens aisés.

Ils ont 4 autres filles, dont Elisa 15 ans, qui est placée comme domestique mais selon l’usage verse ses gages à ses parents. 

Les 3 autres sont Eugénie 12 ans, Marie 9 ans et la petite Amélie qui a alors 7 mois. 

Ils ont également 3 garçons dont Eugène 18 ans et Victor 14 ans qui accompagnent habituellement leur père dans toutes ses tâches et emplois dont l’ensemble des salaires reçus est versé au budget familial. Le dernier garçon, Joseph, est alors âgé de 7 ans et travaille avec ses deux soeurs de 12 et 9 ans.

 

Etienne, dit « chef de famille » a 57 ans au moment de l’enquête de 1860, est un tout petit propriétaire qui, avec ses 2 fils ainés, 18 et 14 ans, travaille sa petite vigne dont il est propriétaire et le champs dont il est locataire mais tous trois gagnent essentiellement une partie de l’argent familial en se louant au long de l’année, soit à la journée, soit à la tâche. 

Sa femme, Alexandrine, a alors 47 ans. Outre s’occuper de son foyer, Alexandrine est multi-tâches et s’occupe tant de l’élevage familial, que du potager, du ramassage du bois mort, etc…… Et surtout, elle semble une comptable avisée. 

 

Parmi les multiples tâches d'Alexandrine se trouve les « lessives » familiales pour lesquelles elle est assistée par sa fille aînée, Nathalie, 21 ans, et par son fils de 14 ans, Victor, qui s'occupe des longs et pénibles portages de linge. Alexandrine et Nathalie consacrent chacune 24 jours de travail annuels à ces lessives et Victor seulement 12 jours pour le portage.

Cela laisse à penser qu'il y avait une douzaine de lessives par an mais que chaque lessive se montait pour les 2 femmes à 2 jours de travail à suivre.

 

Bien sûr, faire la lessive au fin fond d’une campagne de 1860 n’est pas faire la lessive dans les années 1940 à Rennes, un sujet auquel j’ai consacré un article : http://hbscxris.over-blog.com/2020/02/au-bonheur-des-femmes-une-machine-a-laver-bendix-1960.html

La lessiveuse à « champignon » que j’ai décrit dans l’article sus référencé a pour ancêtre la lessiveuse à vapeur de Descartes décrite dans l’Encyclopédie. Mais elle détériorait le linge par des températures trop élevées. Par tâtonnements, on lui substitue au XIXème siècle des lessiveuses, plus ou moins commodes et souvent volumineuses avec un fourneau intégré en dessous, et dans lesquelles le lessivage se faisait par remontée de la lessive dans un tube central sous la pression de la vapeur, Mais c’est à partir des années 1856, qu’un français François Proust fabrique artisanalement, un modèle simple à usage domestique dans son atelier parisien. Mais ce modèle domestique reste longtemps assez confidentiel et n’est vraiment commercialisé qu’à partir de la fin du XIXème, en partie grâce à son succès à l’exposition universelle de 1889. 

La lessiveuse à champignon ne se répandra pas dans les campagnes avant la fin de la 1ère guerre mondiale et encore, bien des familles n’en ont jamais eu et leurs enfants sont parfois même passés directement à la machine à laver moderne à l’électricité, sans pallier intermédiaire.

 

Alors comment se passait une lessive avant la « moderne » lessiveuse à champignon ? 

 

Un vaste sujet auquel j’ai choisi de consacrer tout un article :

La lessive d'Alexandrine ou une lessive au milieu du XIXème siècle.

PRELAVAGE :

Tout le linge à laver était passé une première fois à l’eau claire, frotté pour enlever le plus sale, sur ce point les recettes divergent, certaines frottaient à l’eau claire, d’autres avec du savon, mais il fallait en avoir… Ensuite, on essorait sommairement. C’était une sorte de prélavage. 

Lorsque c’était possible, pour plus de facilité on se rendait à la rivière ou au lavoir en emmenant tout dans des paniers d’osier ou à l’aide d’une brouette et on revenait.

Les lessives étant rares et les volumes à laver d’autant importants, surtout au sortir de l’hiver où on lavait plus rarement, cela pouvait occuper plus que la matinée et ordinairement toute une journée entière.

Il existe une alternative à ce prélavage, c’est un trempage d’environ 12 heures dans le cuvier préparé et chargé.

 

PREPARATION ET CHARGE DU CUVIER :

A l’issue du long prélavage, on préparait le cuvier, une grande cuve circulaire, soit en bois ressemblant à un tonneau qu’on aurait scié, soit en terre cuite dans certaines régions. Le cuvier comprenait en son fond une petite bonde d’évacuation. Les dimensions en diamètre varient considérablement, mais plus d’1 mètre de diamètre était courant pour une hauteur d’environ 70 cm. On en connait des plus grands.

Le cuvier était installé surélevé sur un trépied ou des tréteaux, il était essentiel, vu son poids, qu’il soit parfaitement stable. A la belle saison, il pouvait être installé dehors, mais à la mauvaise saison, en l’absence d’une grange ou d’une remise, il fallait d’abord déménager la pièce à vivre pour la mise en place. 

Le trou de bonde était bouché avec un bouchon de paille. Ce bouchon n’était bien sûr pas étanche mais calculé pour permettre un lent écoulement de la lessive dans le baquet qu’on plaçait en dessous. Il importait que la tresse de paille dépasse bien sous le cuvier pour pouvoir l’arracher aisément quand on voulait vider le cuvier. 

On tapissait le fond du cuvier de fagots, pour permettre une bonne circulation de l’eau dans le fond, notamment au niveau de l’écoulement. On mentionne également parfois le placement de mâchoires inférieures parfaitement blanchies de porc ou de ruminant. Entre les branches ou les os pouvaient être placées des racines ou des plantes diverses lavantes et/ou odorantes.

Par dessus cette sorte de drain de fagots ou mâchoires, on tapissait d’un vieux drap qu'on laissait largement déborder sur les côtés du cuvier de sorte à pouvoir en recouvrir ensuite toute la lessive.

Le linge était empilé, les draps en dessous, puis en principe les vêtements et les torchons et mouchoirs à la fin. Ensuite les recettes varient, selon les lieux, et les capacités financières, soit on intercalait un peu de savon qu’on râpait entre les couches de linge soit le savon râpé était placé sur le dessus uniquement, soit on ne mettait du savon râpé que dans la lessive. D’autres fois, on avait pas du tout de savon, surtout quand on ne pouvait pas s’en payer. 

Une fois le linge bien empilé, on rabattait les côtés du vieux drap de façon à envelopper parfaitement le linge dans le cuvier. Il arrivait que l’on rajoute une vieille toile épaisse par dessus.

Ensuite, en principe on étalait une couche de cendres d’au moins 10 cm d’épaisseur sur le couvercle de toile constitué par le vieux drap.

La cendre devait être soigneusement préparée à l’avance car elle ne pouvait provenir que de bois totalement consumé et être d’une finesse parfaite. N’importe quel résidu pouvait tacher le linge.

 

La recette alternative au prélavage place à ce moment le trempage. Après s’être assuré au préalable de bien boucher hermétiquement la bonde, avoir placé fagots, mâchoires, linges, drap de rabat, savon, cendres, le tout dans l’ordre on mouillait jusqu’à submersion de l’ensemble et on laissait macérer 12h00 au moins.

LA « LESSIVE » A PROPREMENT PARLER :

Pendant que l’on préparait le cuvier, l’eau avait été mise à chauffer, le plus souvent dans un chaudron spécialement dévolu à cet usage, sur le feu de cheminée ou sur un poêle à bois dans les régions qui ont connu plus tôt cette innovation. 

Une fois l’eau bien chaude, on la versait par seaux successifs sur la cendre du cuvier, et elle pénétrait progressivement le linge en entrainant la cendre. Elle parvenait lentement à la bonde et l’eau, freinée par le bouchon de paille, s’écoulait doucement dans le baquet placé en dessous. L’eau du baquet était ensuite remise à chauffer dans le chaudron mais portée à une température plus élevée et on renouvelait l’opération de nombreuses fois en reprenant l’eau d’écoulement et en la remettant à chauffer, la température devant s’élever progressivement. Il ne fallait pas que la surface de la lessive soit trop chaude pour y tremper brièvement une main avant la fin de l’opération.

Si on avait commencé en début d’après-midi, cela pouvait se prolonger tard dans la nuit. Mais en général, le volume des lessives faisait qu’après une journée entière au prélavage, l’on consacrait à la « lessive » une journée entière de l’aube au coucher du soleil.

On comprend l’intérêt de l’invention de la lessiveuse à champignon où l’eau bouillante remonte toute seule dans la tubulure du champignon pour ré-arroser le linge par des buses en éventail…

 

Dans certaines recettes, mais plus rarement, on ne met pas de cendres sur le drap recouvrant le linge du cuvier mais on les dilue dans l’eau du chaudron avec parfois le savon râpé, et des plantes diverses comme des cossettes séchées de racines de saponaire ou de racines d’iris, des feuilles de chêne, des orties, etc… Les usages varient considérablement. 

Le cuvier d'Alexandrine est évalué à 15 fr, le trépied de soutien à 3 fr, la chaudière de fonte dans laquelle l'eau de lessive est chauffée à 5 fr (1°).

Alexandrine achetait annuellement pour 18 fr de savon et 2,5 fr de potasse pour les besoins de ses lessives. En outre, l'enquêteur estime à 9 fr la valeur des cendres du foyer qui sont récupérées pour l'usage spécifique des lessives.

La quantité de bois estimée annuellement pour le chauffage des lessives était évalué à 10 fr.

 

LAVAGE ET RINCAGE

Tableau de Daniel Ridgway Knight, peintre anglais, qui donne à voir la boite « garde-genoux », la planche et le battoir.

Tableau de Daniel Ridgway Knight, peintre anglais, qui donne à voir la boite « garde-genoux », la planche et le battoir.

Après qu’on ait cessé d’alimenter et ré-alimenter en eau chaude le cuvier, on laissait le linge refroidir doucement dans la nuit. 

Le lendemain, il était sorti et chargé le plus souvent sur une brouette pour être emmené au lavoir ou à la rivière. 

Sur le bord de la rivière, pour ne pas être dans la boue, on s’agenouillait dans une boîte en bois à trois côtés appelée garde-genoux (entre multiples appellations) que l’on bourrait de paille pour un meilleur confort.
Là avant de rincer le linge, en fonction de son état, on le re-savonnait là où des marques ou des tâches avaient résisté et on le battait autant que nécessaire en le repliant. Le battage se faisait sur une planche posée en inclinée un côté dans l’eau de la rivière, l’autre contre ou sur le rebord avant du bac et on tapait avec un battoir à manche spécialement conçu à cet effet. De temps en temps, en tenant le linge à deux mains, on le lançait dans l’eau pour qu’il s’étale de sorte à vérifier son état et s’il était satisfaisant, on le rinçait enfin.

Le garde-genoux d'Alexandrine, appelé "augée" dans l'enquête, vaut 2 fr et il y a 2 battoirs à 0,40 fr l'un.

 

Contrairement à une croyance actuelle, les lavoirs en pierre, préservés ici et là dans nos campagnes, ne sont que très rarement très anciens. Certains, dans des villes, datent du XVIIIème, voir exceptionnellement du XVIIème siècle mais la quasi totalité des lavoirs des campagnes remonte à des campagnes de construction entreprises à partir du milieu du XIXème siècle dans un contexte de préoccupations hygiénistes. Il s’agissait de permettre aux femmes l’accès à une eau à peu près propre si possible près des sources quand il y en avait, sans avoir à faire de longs trajets jusqu’au bord d’un cours d’eau plus ou moins adapté et parfois assez sale, les cours d'eau du passé ayant été loin d'être aussi purs et limpides qu'on les imagine aujourd'hui. La rivière à laquelle se rendait Alexandrine et Nathalie était située à 2 km du domicile d'où l'aide au portage de Victor, l'adolescent de 14 ans

Et pour remise en contexte, rappelons qu’en 1861, 70% de la population française vit encore dans les campagnes.

 

Par ailleurs, la mythique des femmes se rassemblant pour rincer le linge au lavoir ou à la rivière pour passer un bon moment à chanter et parfois cancaner est largement erronée. C’est une vision masculine de poètes et d’idéalistes qui ne se sont jamais essayés à cette tâche.

En fait, il n’y avait pas volonté spécifique de se rassembler, mais lorsque les exigences du travail de la terre offraient une courte trêve libérant un peu la main d’oeuvre féminine et que les conditions météo laissaient espérer quelques jours de beau temps successifs pour faire une lessive, il va de soi que toutes les femmes se précipitaient à peu près en même temps à la rivière ou au lavoir (2°). 

Quand à discuter ou chanter en travaillant durement, cela n’exprimait pas forcément le plaisir d’être là et d'être ensemble comme se l’imaginent certains ! Mais cela aidait à supporter les fatigues d’un travail très physique, la froideur habituelle de l’eau, la pénibilité de la position. 

Les esclaves aussi chantaient en travaillant dans les plantations de canne à sucre. Ils sont même à la source de genres musicaux. 

Qui aurait l’outrecuidance de dire qu’ils exprimaient leur plaisir d’être là ?

 

AZURAGE

5. Une famille nombreuse de manoeuvre-vigneron de l'Yonne en 1860 : Une leçon de courage, travail, frugalité, à la charnière d'une époque pour se souvenir du réel, loin du mythe du bon vieux temps… La lessive d'Alexandrine ou une lessive du milieu du XIXème siècle

Après le rinçage, au XIXème siècle, les femmes les plus soucieuses de leur linge blanc ou clair, en rentrant chez elles, le retrempait une dernière fois dans un baquet contenant un peu de « bleu » qui ravivait la blancheur. Le procédé connu sous le nom « d’azurage » à base d’extraits de plantes et de minéraux est ancien mais il était restreint, en principe, à des milieux aisés avant le bleu « Guimet ». C’est un produit dit parfois indigo de synthèse, dont le petit nom est thiosulfate d’aluminosilicate de sodium, mis au point par un chimiste français Jean Baptiste Guimet, (3°) dans les années 1820. Il monte une usine de fabrication dans la région de Lyon en 1831 et rapidement le bleu « Guimet », en boules ou bâtons cylindriques, devient accessible pour un prix modique. Il sera concurrencé à la fin du siècle par le bleu de méthylène mis au point par le chimiste allemand Heinrich Caro. 

On sait qu'Alexandrine a un petit budget d'1 franc annuel pour l'achat de "bleu".

 

SECHAGE

Thérèse Cotard Dupré : La lessive (1910)

Thérèse Cotard Dupré : La lessive (1910)

Après l’azurage », le linge était enfin essoré, en général en étant tordu à 2 personnes.

Ensuite il était souvent étalé sur de l’herbe propre, notamment quand il y avait du soleil, car le soleil blanchit le linge et l’assainit (4°). S’il faisait très beau, il était même d’usage de l’arroser une ou deux fois pendant son séchage.

On pouvait aussi étendre sur des haies parfois taillées à cet effet, sur des plessis tressés entourant par exemple un potager ou sur des cordes si on en avait car ce n’était pas non plus quelque chose de courant et le fil de fer plastifié ou pas n’existait pas. Les pinces à linge n’existaient pas non plus, si ce n’est éventuellement sous forme de cylindres de baliveaux fendus. Si on avait une corde, faute de pinces, les chemises étaient enfilées sur la corde par les manches, la corde était alors attachée et les autres pièces de linge dont les draps étaient mis « en deux » dessus. Par intempéries, il fallait se résoudre à étendre comme on pouvait dans une grange, un grenier si on en disposait, là où on vivait si on avait pas d’autres solutions, ce qui n’était guère sain.

 

L’eau de lessive, bien que souvent très fortement colorée par les passages successifs sur des linges très sales n’était pas jetée pour autant. Elle pouvait servir au nettoyage de divers objets, y compris des récipients à cuire les aliments qui n’étaient que très rarement nettoyés et sa charge en matières décapantes la rendait appropriée pour le décapage d’un carrelage de terre cuite dans les domiciles qui avaient mieux que de la terre battue.

 

Notes :

 

(1°) Sur les prix, pour les remettre en contexte, rappelons qu'un journée de travail d'Etienne est évaluée à 1,50 fr, une journée de travail d'Alexandrine vaut 1 fr, une journée d'un des 3 enfants 0,15 fr.

Il ne s'agit bien entendu aucunement de journées de travail de 8h, mais de journées de travail oscillant entre 10h en hiver et 14h en été.

 

(2°) A cela s’ajoute des jours d’interdiction de « lessive » liés à des fêtes religieuses ou à des superstitions locales, en nombre très variable selon les régions et très diversement respectées au XIXème siècle selon les croyances et les pressions sociales.

 

(3°) Pour la petite histoire, en 1855, Jean Baptiste Guimet et un ingénieur Henry Merle fonderont la Compagnie des produits chimiques d’Alais et de la Camargue qui deviendront le groupe Péchiney dont le nom n’évoque peut-être plus rien pour les moins de 20 ans…

 

(4°) Outre un phénomène de blanchiment, les UV des rayons solaires inactivent bactéries, virus et protozoaires. Exposer son linge au soleil est donc une méthode très simple de désinfection, ce que bien sûr nos ancêtres ne savaient pas.

 

Un cuvier "moderne" début XXème siècle

Un cuvier "moderne" début XXème siècle

Pour conclure, cette carte postale très connue d’une Berrychonne faisant sa « buée » au début du XXème siècle donne une bonne illustration de ce qu’était un cuvier sur son trépied et elle illustre nombre de sites qui « racontent » la lessive à l’ancienne, parfois plutôt bien d’ailleurs. 

Néanmoins pour « la lessive au XIXème siècle ou avant », elle est déjà anachronique et il faut bien « lire » les détails.

Sur cette photographie, la modernité est déjà passée par là pour transformer le cuvier, car à partir de la bonde située sur le côté et non plus en dessous comme auparavant, l’eau de lessive repart directement dans un tuyau métallique vers le chaudron, situé à côté, positionné légèrement plus bas. Cela évite la noria des seaux ou baquets de récupération qu’il y avait auparavant pour remettre manuellement la « lessive » écoulée à réchauffer dans le chaudron. 

Sur cette carte postale, la femme, qui fait sa lessive, a gagné une manipulation par rapport à un passé encore récent. Avec son écope au bout d’une perche, elle remet au fur et à mesure dans le cuvier la « lessive » qui réchauffe dans le chaudron directement à côté et dans lequel cette « lessive » est arrivée toute seule grâce au tuyau d’écoulement.

En outre, on remarque que le cuvier est cerclé de fer, et non de gaules de bois fendues et ligaturées. Le cerclage de fer, comme le tuyau, qui évacue l’eau, ou le beau chaudron à trépied, qui même s’il n’intègre pas encore un foyer fermé sous la partie récipient, comme on le voit parfois, n’en indique pas moins un pallier civilisationnel, franchi grâce à la révolution sidérurgique du XIXème. 

 

 

A suivre :

-L'alimentation de la famille d'Etienne et Alexandrine : manger local en 1860, un exemple de quasi autarcie alimentaire, faut-il en rêver ?

 

 

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