Archéologie, Histoire de l'agriculture, de l'élevage, de l'alimentation, des paysages, de la nature. Sols, faunes et flores. Les sciences de la nature contre les pseudos-sciences, contre l'ignorance, contre les croyances, contre les prêcheurs de l’apocalypse.
15 Septembre 2019
J’habite au bout de la terre, sous les tropiques, dans une région où il fait beau toute l’année, même si on connait 3-4 mois d’hiver tropical où les nuits peuvent tomber à 8-10° bien que les journées oscillent tout de même autour des 20-25°, rarement moins. Les temps couverts sont très rares et les pluies ne tombent que brièvement et souvent brutalement, à l’exception des 3 mois de la grande saison sèche. Donc il y a un grand soleil quasiment toute l’année, 2 jours nuageux d’affilée étant une véritable exception.
Vu le prix de l’électricité du réseau, le double de celui de la France, et ayant une tranchée à creuser et 200 mètres de câble à passer pour me connecter au réseau dans ma nouvelle maison, je me suis dit qu’une installation solaire en autonomie complète pourrait peut-être s’avérer intéressante.
Soyons honnête, sur 2 points :
-Je ne suis pas une spécialiste de l’électricité même si j’en sais assez pour câbler toute une maison, tableau électrique inclus, dans le respect strict des dernières normes EDF. Je l’ai déjà fait. Mais je connais mal les calculs de production et de stockage de l’électricité.
-Je m’étais déjà intéressée à la question en France, mais on m’avait déjà expliqué que même en ayant un chauffage non électrique et une cuisinière à gaz, il était totalement impossible de vivre en autonomie sous les climats de le la moitié nord de la France, à moins de renoncer au 3/4 des équipements électroménagers modernes, sauf usage régulier d’un groupe électrogène d’appoint lorsqu’on veut, par exemple, faire fonctionner une machine à laver.
Le gros problème de l’électricité est qu’on ne la stocke que très mal et à des coûts faramineux. Et depuis quelques décennies, toutes les belles annonces qui se succèdent de solutions révolutionnaires de stockage électrique, se révèlent aussi peu performantes et aussi chères les unes que les autres.
L’électricité doit donc principalement être produite à la demande, ce qui pose un sacré problème sous des climats non adaptés. C’est la raison pour laquelle, dans les pays d’Europe, au niveau des équipements de maisons individuelles, seul le solaire relié au réseau électrique pour revente a été développé. Les particuliers, qui se sont équipés, revendent leur électricité à EDF, qui a l’obligation légale de la racheter à un prix qui a tendance à baisser mais reste extrêmement rentable par rapport au prix du marché. Malheureusement pour tout le monde cette électricité solaire étant très chère, cette mesure étatique grève petit à petit le coût de notre électricité.
J’ai essayé désespérément d’élaborer moi même la conception de mon alimentation solaire sur Internet, mais j’ai rapidement halluciné.
Il est en effet extrêmement difficile voir presque impossible de trouver des informations fiables sur Internet en matière d’énergie solaire ou éolienne. C’est un quasi cauchemar….
En effet, derrière les 4/5ème des sites qui proposent des informations soit disant fiables et complètes, se cachent des sites privés de ventes d’équipements dont le seul but est de vous faire croire que solaire ou éolien sont des énergies compétitives et que vous devez absolument vous convertir et acheter, et si possible acheter chez eux…
Donc leurs prévisions et leurs estimations sont vagues et très incomplètes, leurs affirmations non étayées ni vérifiées, et leurs promesses n’engagent que ceux qui les reçoivent.
Le 1/5ème restant de sites provient de la mouvance écologiste qui a un culte du retour à un âge révolu, années 1950, XIXème siècle, moyen âge, néolithique, on ne sait pas trop mais trouve fantastique de faire sa lessive à la main dans une bassine d’eau chauffée sur un feu de bois et en utilisant des cendres pour lessive. Si tant est qu’on lave encore son linge… car on y voit émerger la mode de ne plus se laver, les savons et produits à douche étant jugés « toxiques », mieux vaut être sale et attraper une de ces maladies de peau, genre furonculose, si courantes autrefois ou offrir un logis de choix à un de ces multiples micro-parasites qui adorent la crasse et sont vecteurs de pathologies diverses.
J’ai fini par faire une heure et demi de route pour aller à la grande ville voir, sur RV, un « spécialiste » qui m’avait été chaudement recommandé.
Nous nous sommes installés pour plus d’une heure…
Le « spécialiste » dont je me demande avec le recul s’il connaissait son sujet du solaire beaucoup plus que moi, m’a demandé d’évaluer les besoins familiaux.
Nous sommes 2, parfois 3 ou 4 pour une nouvelle maison qui va faire centaine de m2 plus la terrasse couverte où on vit beaucoup.
Bon bien sûr j’ai rayé tout de suite la partie cuisson en m’engageant sur une cuisinière à gaz.
Et je n’ai pas à me soucier du chauffage, les quelques mois plus frais, on ressort les couettes pour la nuit et on revêt un pull over au petit matin.
J’ai donc seulement énuméré l’indispensable : éclairages, en promettant des LED, cafetière électrique, micro-ondes avec utilisation raisonnable, fonctionnement PC portables et tablettes, non négociable, une seule TV limitée à 4h par jour, un réfrigérateur assez grand et un même un grand congélateur, (le « spécialiste" fronce les sourcils !) la recharge électrique de nos nombreux appareils de bricolage, indispensables dans une zone isolée où on fait beaucoup de choses soi-même.
J’ai zappé la climatisation, on ouvrira les fenêtres, je sens que le spécialiste est déjà énervé par mes prétentions exorbitantes, notamment le grand congélateur, une honte !
Et je suis arrivée au surpresseur ! Cri d’effroi du « spécialiste »… Bon, nous n’avons pas l’eau du réseau. On fonctionne donc avec un système de récupération des eaux de pluies des toitures, filtrations, stockage dans 20m3 de cuves. En dépit du positionnement de la cuve sur une petite hauteur, pour avoir quand même de l’eau au robinet à une pression à peu près constante, il faut un surpresseur électrique qui se déclenche automatiquement chaque fois que nécessaire.
Ok, à contrecoeur, le « spécialiste » coche le surpresseur.
Comme on vit dans une zone tout de même ensoleillée sans doute 340 jours/365, je me lance dans le demande d’une machine à laver le linge et d’une machine à laver la vaisselle.
Le « spécialiste » pâlit et répond aussitôt « Comptez sur le groupe électrogène pour cela ». J’insiste, j’insiste, j’insiste….. Sans compter le stockage des bidons d’essence, je ne vais quand même pas démarrer un groupe électrogène puant et bruyant à chaque lessive. Et le lave-vaisselle permet de consommer moins d’eau.
Bon finalement, il intègre ma demande mais non sans manifester un mélange de désarroi et de colère interne. Il est à bout. Je comprends bien que j’appartiens à la catégorie des grand responsables du réchauffement climatique...
Nous partons sur le stockage et les batteries. Je souhaite 48h d’autonomie ce qui me parait suffisant vu l’ensoleillement optimum là où je vis et ce n’est pas grand chose par rapport à des systèmes en autonomie sur 7 jours en France.
Le « spécialiste » se ronge les ongles et me propose 24h comme il y a beaucoup de soleil et il me rappelle que le coût des batteries est faramineux.
Il me propose alors des batteries au gel et plomb. Je fronce les sourcils : « ces vieux machins dépassés, encombrants et lourds et polluants ??? »
Je réclame des batteries au lithium-ion dont on lit partout qu’elles sont les meilleures et les plus performantes.
Le spécialiste soupire et m’explique que
1- elles sont beaucoup plus chères que des batteries au plomb et ne durent que 5 ans contre 10 ans pour des batteries au plomb.
2- je réside dans un endroit où il fait beau toute l’année et parfois très chaud, alors ai-je prévu une pièce sécurisée spéciale dédiée au stockage des batteries en annexe de la maison ?
Bien sûr que non ! Et là, « le spécialiste » m’explique que même si les batteries au lithium fonctionnent dans des plages de température importantes, elles ne développent vraiment leurs performances qu’aux alentours d’une température de 25°. En outre, quand on s'éloigne de la plage 15°-28°, elles s'usent encore plus vite. Il faut donc leur prévoir un local ventilé où la température pourra être à peu près maintenue, le cas échéant avec une climatisation… Curieux il faudrait donc commencer à consommer de l’électricité avec une climatisation pour obtenir un fonctionnement des batteries au lithium. Il y a comme un serpent qui se mord la queue.
En outre, « le spécialiste » me précise qu’elles présentent un risque d’incendie ou d’explosion en cas de mauvais stockage et que les composés de ces batteries sont particulièrement toxiques… « Plus que le plomb », je lui demande ? Oui bien plus que le plomb me répond t-il…
Bon partons sur les batteries au plomb, je m’étonne du nombre de batteries, vu les capacités de stockage de ces batteries, et là le « spécialiste » m’explique « votre batterie au plomb, vous ne pouvez pas la décharger » ????
Moi « pardon, je ne comprends pas » Et il m’explique, comme à la débile de service, qu’une batterie au plomb ne doit jamais se décharger en dessous de 80%. Si on la décharge plus, sa durée de vie se réduit rapidement. Donc en fait sur la capacité de stockage annoncée d’une batterie au plomb, seuls 20% sont réels. Ben dis donc, on nous prendrait pas pour des truffes ?
Un certain nombre d’affirmations du « spécialiste » me laissent perplexes…
Je ne rentrerais pas dans les panneaux solaires thermiques, dépassés, et je resterais dans le « très performant » photovoltaïque. Durée de vie annoncée par le spécialiste pour un optimum de production : 20 ans, au delà, les performances décroissent rapidement.
Très bien, mais je connais quelqu’un, Charles, à 20 mn au sud de chez moi, encore plus au milieu de nulle part, équipé en autonomie complète en photovoltaïque. La première ligne électrique à laquelle Charles pourrait demander un raccordement est à près de 2 km de chez lui. Après avoir fonctionné des années au groupe électrogène, il a fini par s'équiper en solaire il y a une quinzaine d'années. Il n'a pas de gros besoins, comme les gens habitués à vivre sans réseau électrique, il a toujours eu une cuisinière à gaz, un frigidaire au gaz (si cela existe). Photovoltaïque ou pas, il a bien sûr gardé son groupe électrogène pour aider de temps en temps, notamment quand il faut lancer la machine à laver le linge.
Il m’a expliqué qu’au bout de 10 ans, on remarquait une perte de puissance des panneaux qui s’aggrave rapidement ensuite, ce qui l’a amené à limiter ses besoins énergétiques en changeant toutes ses ampoules et en limitant tout ce qui pouvait être possible, casserole sur le gaz plutôt que micro-ondes, cafetière à l'ancienne et pour l'informatique, il va chez un voisin. Il pense renouveler tous ses panneaux d’ici quelques années, ce qui aura fait 20 ans de durée pour les panneaux.
Il m’a également précisé nettoyer soigneusement ses panneaux en moyenne tous les 15 jours, la poussière se déposant, surtout à la saison sèche, limitant la capacité des panneaux.
Allez, soyons optimistes, et considérons que c’est une vieille génération de panneaux photo-voltaïques et que les nouveaux sont plus performants et plus durables.
Mais pour les batteries au plomb, Charles a été catégorique : 5 ans maximum et il faut tout renouveler.
Notre consommation électrique est d’un peu moins de 3000 kw/h par an soit environ 1200 euros.
Des sites estiment la consommation de 4 personnes dans une maison de 100m2, non chauffé à l’électrique, entre 2000 et 2500 kw/h par an… Pas possible ils doivent pédaler à tour de rôle pour alimenter un générateur…
A titre comparatif, en France, la même consommation couterait 650 euros/an, abonnement compris, mais grâce au nucléaire, c’est l’électricité la moins chère d’Europe.
Et si nous vivions en Allemagne, nous paierions également à peu près 1200 euros annuels pour ce niveau de consommation et encore les allemands peuvent dire merci à la France car nous leur vendons très régulièrement à prix préférentiel de l’électricité d’origine nucléaire.
En effet, les allemands ont refusé le nucléaire et investi massivement dans le solaire et l’éolien, ce faisant, lorsque ni le solaire, ni l’éolien ne peuvent répondre à la demande, ils doivent utiliser leurs vieilles centrales thermiques souvent à la lignite et très polluantes, ce qui fait d’ailleurs de ce pays le champion européen de la pollution au CO2. Pour limiter les dégâts et pallier à la faiblesse de leurs centrales traditionnelles, les allemands achètent donc beaucoup d’électricité « nucléaire » chez nous et à si petit prix qu'ils auraient tort de s’en priver. Comme on est très gentil, on leur achète un peu de solaire et d’éolien quand ils sont en surproduction et ne savent qu’en faire, car en France, pas de problème, on peut moduler la production d’électricité en fonction de la demande, grâce au nucléaire. Enfin tant qu'on en a......
Le « spécialiste » transpire sur son calcul et moi je n’ai même plus de questions tellement je suis perplexe.
Finalement il grimace et me dit « Vous avez vraiment de gros besoins, donc au minimum en première estimation, on peut dire 25 000 euros le coût de votre installation complète, sans la pose, dont plus de la moitié pour les batteries, mais avec tout ce que vous demandez il va falloir affiner, je vais refaire faire les calculs et le schéma à une société spécialisée et cela sera sans doute plus cher… Et de toutes façons, rajoutez l’achat d’un groupe électrogène pour pallier à une éventuelle insuffisance temporaire »
Ah, le « spécialiste » a lui-même besoin d’une société spécialisée ?
Pas besoin de faire des calculs compliqués….. 25 000 euros divisés par notre consommation annuelle d’électricité de 1200 euros, cela fait 21 ans d’amortissements.
Sauf qu’en 21 ans, il aura fallu changer 4 fois les batteries, renouveler au moins 1 fois le coûteux onduleur et les panneaux photo-voltaïques aux performances bien déclinantes devront être changées à ce terme.
Je me demande alors, si avec l’ébauche bien vague de projet que j’ai en main, je ne pourrais pas faire venir le matériel de France.
Je pianote alors longuement sur Internet, et j’arrive à des 6000 ou 8000 euros… Intéressant ??? Non… car à bien regarder les détails, sur les kits proposés pour mes besoins, il y a une seule batterie ou plusieurs de faibles puissances, donc il faudra en rajouter, en option, au coût faramineux des batteries. Sur la plupart des sites, l’onduleur est en option ce qui est aberrant pour des systèmes en autonomie. Bref, au final, on est plus près de 15 000 euros, plus les frais de transport et le dédouanement en arrivant ici………..
Fin de l’histoire
Non pas tout à fait, car il n’y a que les cons qui ne changent jamais d’avis…
Cette anecdote récente résume la réalité de l’énergie photovoltaïque en juin 2019.
Il n’est pas exclu que dans les années qui viennent émergent de nouvelles générations de panneaux solaires, faisant appel à de nouvelles technologies, qui rendront ces panneaux bien plus performants qu’aujourd’hui, réellement durables, et non générateurs d’une pollution importante tant lors de leur fabrication que lors de leur démantèlement et destruction.
Il n’est pas non plus exclu que l’on mette au point des années à venir de nouveaux moyens de stockage de l’électricité, vraiment peu couteux, peu polluant, durables et performants.
Je crois même que c’est possible, si l’on se retourne pour contempler les 2 derniers siècles de progrès technologiques fantastiques qui ont changé nos vies en Occident, absolument pour le meilleur quoi qu’en pense certains et certaines hystériques et collapsologues.